Le yoga est un art

Patanjali nous dit dans le sutra II.47  Rupa lavanya bala vajra sambananatvani kayasampat  « la pratique idéale des asanas apporte au corps la beauté, la grâce, la force et la solidité. Selon les circonstances, il aura l’éclat et la dureté du diamant ou la douceur et le raffinement d’une fleur ».

Dans Lumière sur les Yoga Sutra de Patanjali, B.K.S. Iyengar nous rappelle, à la suite de ce sutra,  que le yoga est un art. L’art canalise le talent et la technique de l’artiste dans la voie qu’il a choisie, et cette voie devient la religion du Soi (svadharma : le devoir propre de chacun, la disposition naturelle dans laquelle il se trouve et qu’il doit suivre).

Le yoga, comme tout art, implique la discipline. Il développe  le corps, le mental et l’intellect. Son but est de raffiner l’homme. Le pratiquant de yoga est à la fois l’artiste, l’instrument et l’œuvre à découvrir, à révéler, à accomplir. Toute action réalisée dans la beauté et la pureté, dans l’harmonie complète du corps, du mental et de l’âme est de l’art. Fait de cette façon, l’art élève l’artiste.

L’art est un processus sans fin, sans limites. De même, on doit pratiquer les asanas de  manière attentive,  studieuse et en  cultivant le  gout du raffinement présent dans  l’art.

Il existe un nombre infini de postures de yoga. Par la pratique précise et rigoureuse des différentes catégories de postures, on aura des effets différents. Il est ainsi possible de nourrir et d’énergiser chaque partie du corps et de créer une action nettoyante et vitalisante dans le corps et l’esprit. Il faut synchroniser les mouvements des membres, observant soigneusement l’extension, l’expansion et la création d’espace permettant à l’intelligence de pénétrer dans le corps tout entier et permettant à l’énergie de couler librement.

Chaque art présente  ses propres difficultés. Des moments de peur, d’inconfort, de tension, de frustration et de rejet peuvent envahir l’esprit de l’artiste (du pratiquant) et tuer son intérêt. Ces moments doivent être acceptés comme des compagnons inévitables sur le chemin de la création artistique. Imperturbable, l’artiste (le pratiquant) doit continuer son travail et utiliser son code d’éthique (yama et niyama), son intelligence (buddhi), son raisonnement, son jugement et sa vision intérieure pour atteindre le  moment ou  l’expérimentation prendra  fin et l’ expérience deviendra unique, vraie, cristalline.

La joie et la béatitude que le yoga apporte nourrit indéniablement  notre être toutefois la pratique peut avoir un goût  amer et désagréable au début –autrement tout le monde le pratiquerait sérieusement. C’est désagréable parce que ça va à l’encontre des désirs et des sens et nous vivons dans un monde dominé par les sens. Le mental est divisé entre son attirance envers les sens et la route vers le Soi. La pratique des postures éteint cette dualité du mental et la pratique devient antaratma sadhana, la recherche de l’âme. Si cela peut être amer au début, avec le temps, la foi et la persévérance,  cela devient du nectar. C’est une joie pure, réelle, unique.

Quand le yogi est un artiste accompli, l’art du yoga coule en lui dans la paix et  la joie. L’observateur de cet art sera attiré et voudra lui aussi expérimenter cette élégance, cette harmonie, cet équilibre et cette sérénité.

« Ma pratique élève mes pensées, purifie mon esprit, apporte  calme, assurance et grâce  dans chaque fibre de mon corps et sublime mon égo. L’intensité et la sincérité de ma pratique m’a permis de réaliser cette vérité ou l’asana et moi devenons un ». B.K.S. Iyengar.

Ce texte est très largement inspiré de The Art of Yoga de B.K.S. Iyengar.