Sérénité

12

On fait du yoga pour différentes raisons, on veut être plus souple, moins stressé, on veut se sentir mieux. Comme on l’a vu dans les premiers sutra, le yoga nous propose une destination beaucoup plus profonde : Le yoga c’est l’arrêt des mouvements de la conscience. Alors, l’âme reste et resplendit dans sa demeure. Bien sûr alors, nous sommes sereins.
Pour devenir serein, il nous faut changer. Il y a des obstacles sur la route du changement. En ces temps de bouleversements, nous avons besoin plus que jamais de rester sereins. Il nous faut être vigilants et reconnaître les obstacles à la sérénité (cittaprasadanam).
Au sutra I.30, Patanjali nous parle de cittaviksepa : l’esprit perturbé, dispersé, fluctuant. Le sutra énumère les obstacles (antaraya) qui causent ces perturbations de la conscience :
Vyadhi : la maladie
Styana : inertie, manque de persévérance, d’intérêt, procrastination
Samsaya : doute, indécision due au scepticisme
Pramada : Négligence
Alasya : oisiveté, paresse physique
Avirati : incontinence, manque de modération, assouvissement des sens
Bhrantidarsana : vivre dans l’illusion, l’erreur, perplexité, confusion
Alabdhabhumikattva : être incapable de persévérer sur une voie, ne pas pouvoir garder ce qui est obtenu
Anavasthitatvani : état instable, rechute
Il ajoute au sutra I.31 :
Duhkha : Tristesse, chagrin, détresse
Daurmanasya : dépression, désespoir
Angamejayatva : agitation du corps
Svasaprasvasah : respiration désordonnée.
Nous reviendrons sur ces obstacles. Pour l’instant rappelons-nous les deux principes de base du yoga (I.12), pratique et détachement. Ici, détachement veut dire reconnaître l’obstacle mais ne pas s’y identifier.
Je ressens de la tristesse mais je ne suis pas cette tristesse. Je ressens du désespoir mais je ne suis pas ce désespoir.
Nous avons tendance à nous identifier à nos peurs, à leur donner toute la place. Alors nous oublions notre essence et nous nous figeons. Nous respirons moins bien, nous dormons moins bien, nous devenons confus…nous mourons de peur. Une partie importante de nous ne peut plus vivre. N’oublions pas notre essence, notre vraie nature rayonnante.
Respirons,
À bientôt


La lumière

11

On nous dit : Tu es poussière et tu redeviendras poussière. C’est vrai.
Mais plus important, plus vrai, tu es lumière, nous sommes lumière.
Restons dans la lumière.
Voici mes inspirations du jour :

De Shabkar, maître tibétain du XIXe siècle :

Pur, lumineux, éveillé,
À jamais éveillé et transparent.
Laisse ton esprit au repos,
Ouvert et sans attache.
Puisse la sagesse de la vacuité se manifester,
Immaculée et transparente comme le ciel.

Et de Shams de Tabriz :
Ne tente pas de résister aux changements qui s’imposent à toi. Au contraire, laisse la vie continuer en toi. Et ne t’inquiète pas que ta vie soit sens dessus dessous. Comment sais –tu que le sens auquel tu es habitué est meilleur que celui à venir ?
Bon dimanche


La tête à l’envers

10

La fleur du yoga compte huit pétales. Nous avons déjà abordé les deux premiers, yama et niyama. Le troisième pétale, le plus connu peut-être, est asana : posture, position. Patanjali en parle au sutra suivant :
II.46 Sthira sukham asanam
L’asana est la parfaite stabilité du corps et de l’intelligence, ainsi que la bienveillance du mental.
D’abord, la posture façonne le corps, ensuite, avec la pratique, la posture s’exprime de l’intérieur. Elle nous conduit, comme le disait Gérard Blitz, à « être fermement établi dans un espace heureux ».
Il y aurait énormément à dire sur les asanas et leurs effets.
Aujourd’hui je vous invite à consulter un programme de pratique noté plus bas. Il s’agit d’une pratique pour renforcer le système immunitaire, pratique suggérée par B.K.S. Iyengar en 2009, lors de l’épidémie H1N1.
Notez la grande importance accordée aux inversions dans cette pratique (le matin et le soir). C’est une catégorie de postures très importante qui, idéalement, fait partie de la pratique quotidienne. Je trouve que se mettre la tête en bas remet les idées en place, et aide à être plus équanime.
Cette pratique s’adresse è des pratiquants prêts à y consacrer du temps et de l’énergie. Si vous avez peu de temps et n’avez pas d’expérience des postures inversées, vous pouvez vous en inspirer et commencer par :
Uttanasana, Adho Mukha Svanasana, Viparita Karani.
Je vous mentionne quelques effets (entre autres) de ces trois postures, qui,je l’espère vous convaincront de dérouler le tapis!
Uttanasana : Si l’on tient la posture pendant deux minutes ou plus, toute impression de dépression morale est éliminée. Cette posture est un bienfait pour les gens qui s’énervent facilement car elle calme les cellules cérébrales. Après cet asana, on se sent calme et rafraîchi, les yeux deviennent brillants et l’esprit est en paix.
Adho Mukha Svanasana : Une station prolongée dans cette posture enlève la fatigue et redonne l’énergie perdue. C’est une posture vivifiante.
Viparita Karani : Ouverture de la poitrine. Retour veineux accru. Calme le cerveau. Facilite la respiration profonde. Détend profondément.

Bonne pratique, Respirez,
À bientôt

Pratique pour renforcer le système immunitaire
Pratique du matin
– Uttanasana 5 minutes
– Adho Mukha Svanasana 5 minutes
– Prasarita Padottanasana 5 minutes
– Sirsasana 5 minutes, Parsva Sirsasana, Upavista Konasana en Sirsasana, Eka Pada Sirsasana, Parsvaika Pada
Sirsasana (peut donner un total de 15 minutes)
– Viparita Dandasana utilisant la chaise 5 minutes
– Sarvangasana 10 minutes
– Halasana 5 minutes
– Variations de Sarvangasana : Eka Pada Sarvangasana, Parsvaika Pada Sarvangasana, Supta Konasana, 5 minutes
– Setu Bandha Sarvangasana 5 minutes
– Viparita Karani 5 minutes
– Savasana 10 minutes

Pratique du soir
– Sirsasana 10 minutes
– Sarvangasana 10 minutes
– Halasana 5 minutes
– Setu Bhanda Sarvangasana 10 minutes
– Savasana 10 minutes
Si nécessaire, faire les postures avec accessoires.
Si vous n’êtes pas familiers avec la durée suggérée, faites le mieux possible dans la prudence et augmenter la durée peu à peu.


Il faudrait aussi être content?

9

Depuis quelques jours, ma chaise longue est installée dehors. Quand le soleil se pointe, affublée de manteau, casquette, foulard et bottes, je m’y assois face au banc de neige. J’appelle ça le sanatorium. Ça me fait du bien. Des instants ou rien ne me manque.
Ce matin, il neige, il-nei-ge!! le ciel est gris, je ne suis pas contente.

Après yama, le deuxième pétale du yoga est niyama. Il est constitué de cinq observances éthiques individuelles. Il s’agit de Sauca : pureté du corps et du mental, Santosa : contentement, Tapas : autodiscipline, Svadhyaya : étude de soi et étude de textes sacrés, Ishvara Pranidhana : abandon au divin.
Intéressons-nous aujourd’hui à Santosa

II.42 Santosat anuttamah sukhalalabkak
Le bonheur suprême découle du contentement et d’une conscience bienveillante.
Santosa, c’est la capacité de rester content même en l’absence d’objets désirés.
C’est, dit Françoise Mazel, un état d’esprit, une attitude mentale qui oriente les pensées, les actes, les réactions. C’est vivre au présent, dans un état de paix intérieure dans lequel il n’y a plus ni manque ni volonté d’obtenir.
C’est de rester serein même, et surtout, dans les situations difficiles.
Demeurer dans un état de contentement dans une situation difficile, dans une posture difficile est un grand défi et la tentation est souvent grande de renoncer ou de réagir émotivement, se fâcher, ou s’abandonner au sentiment de frustration, à la colère ou la tristesse. La pratique des asanas et du pranayama nous aide à faire face aux situations difficiles, à faire face aux obstacles qu’ils soient physiques, émotionnels ou mentaux.
Restons dans la conscience bienveillante.
Et, comme le dit Shams de Tabriz, n’entrons pas dans les faubourgs du désespoir.
Belle journée à vous


Entre les deux rives

8

Yama
Outre ahimsa : la non-violence, yama inclut satya : la vérité, asteya : ne pas voler, ne pas prendre, brahmacarya : continence, modération et finalement, aparigraha : absence d’avidité, liberté face aux désirs.
Les deux premiers principes énoncés, non-violence et vérité peuvent aussi être des guides précieux dans la pratique des asana. B.K.S. Iyengar évoquait fréquemment ces deux principes et disait que toujours, dans la pratique, on devait s’assurer de rester entre les rives de ahimsa et satya. Reconnaître dans notre pratique l’état de notre corps et de notre mental, apprendre à observer et tenir compte de nos observations, tout cela nous permet d’évoluer à l’intérieur des rives de ahimsa et satya. Comment trouver la vérité, l’honnêteté dans la posture. D’abord, il faut observer, voir, sentir. Par exemple, ai-je bien aligné mes pieds, le poids du corps est-il réparti également, est-ce que j’utilise également les deux côtés de mon corps? Une fois que j’ai observé une faiblesse, une asymétrie, quelle sera mon attitude? Rester là ou ajuster, corriger? Rester là implique un laisser-faire, qui a plus à voir avec la violence qu’avec la non-violence. Il faut du courage pour changer et le yoga nous aide à développer ce courage.
Quand la droite et la gauche sont intégrées, on se trouve en présence de la vérité. La véritable non-violence, c’est cet équilibre entre les deux dit B.K.S. Iyengar
Gandhi disait qu’il faut chercher l’étreinte de la vérité. « Ahimsa (non-violence) est le moyen, satya (vérité) est le but. La vérité doit constituer le cœur de notre activité. Dès qu’elle est débarrassée des toiles d’araignées de l’ignorance, la vérité brille avec éclat ». Ghandi.
Mon professeur Faeq Biria, racontait l’histoire suivante :
Vous êtes dans un grenier, dans l’obscurité. Quelqu’un vient et allume. Tout à coup vous voyez ce qui vous entoure ; des trésors oubliés peut-être mais surtout la poussière, les toiles d’araignées, les araignées… Que faire alors? Peut-on éteindre et faire comme si on n’avait rien vu?
Dans la pratique comme dans la vie, avançons, impeccables, entre les rives de ahimsa et satya.
Soyons braves.
Prenez soin de vous et des vôtres.
Respirez.
À bientôt