Pourquoi pratiquer le yoga aujourd’hui

. Le rythme de vie rapide de la plupart d’entre nous  demande  trop  d’énergie physique et mentale. Le corps et l’esprit en paient le prix. Le corps perd son dynamisme, se fatigue, le dos se voûte, les épaules s’affaissent… à l’intérieur, rien n’est plus tout à fait à sa place. Le mental s’épuise aussi, nous perdons notre présence à nous-mêmes, et la clarté  disparait. La pratique du yoga Iyengar développe la  présence. Aligner son corps demande une attention constante, alors  le mental  abandonne  les autres pensées et s’unit aux sens et  à l’intelligence  pour observer le corps,  sentir comment il occupe l’espace, évaluer les changements à faire,  de sorte que chaque partie du corps (bras, main, doigt, hanche, genoux, pied etc ) soit à sa place dans la posture. Cet alignement permet de trouver la stabilité. Le corps est stable mais non statique, toujours vivant, vibrant. La colonne vertébrale s’étire, les organes internes trouvent aussi leur place, la respiration et la circulation se font librement et l’énergie peut circuler.

Par l’étirement, on crée de l’espace en soi. En créant l’espace, on crée la liberté. A la fin de la pratique, le corps et l’esprit seront plus légers et plus libres.


Penser juste pour voir clair

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Après avoir énoncé ce que sont les yama (non-violence, ne pas mentir, ne pas voler, la modération et l’absence d’avidité) ainsi que les niyama (propreté, contentement, pratique ardente, étude de soi et abandon au divin), Patanjali nous rappelle dans les sutra suivants (II.33 et II.34) que yama et niyama ne s’appliquent pas qu’aux actions et aux paroles, mais aussi aux pensées. Il nous dit que les pensées contraires aux yama et niyama doivent être contrecarrées par le discernement.
Il y est question de pratipaksa bhavanam – produire, cultiver un courant contraire. Quand une pensée perturbante nous assaille, il faut nourrir la pensée contraire.
« Les pensées indésirables sont celles qui s’opposent au flot de la vie, que nous les exécutions nous-mêmes, que nous en causions l’exécution ou que le permettions chez les autres. Elles sont le produit de l’avidité, de la colère et de l’égarement; leur intensité peut varier de légère à modérée, à forte. Voilà pourquoi on doit alimenter les pensées contraires ». sutra II.34 traduction Bouchart D’Orval.
Nous arrivons assez facilement à contrôler nos gestes, nous arrivons la plupart du temps à contrôler nos paroles, mais nos pensées….nous les laissons souvent nous contrôler. S’il s’agit de pensées malsaines, elles ont d’abord un effet malsain sur nous-mêmes.
Selon Vivekananda , « chaque pensée vicieuse va rebondir, chaque pensée de haine est emmagasinée (stored up) et vous reviendra un jour avec un grande puissance sous la forme de quelque misère. Si vous projetez la haine et la jalousie, elles rebondiront avec un intérêt composé. Rien ne pourra les arrêter; une fois que vous les avez mises en marche, vous devrez les supporter (bear them) ».
Comment éloigner une pensée indésirable (selon yama et niyama)? D’abord, prendre conscience de sa nature, la reconnaître en utilisant le discernement, la sagesse discriminative. Ne pas la laisser grandir, ne pas la laisser pénétrer plus avant. B.K.S. Iyengar utilise la métaphore suivante : vous êtes une ville avec un port. Un cargo chargé de matières contaminées, dangereuses veut entrer dans votre port, le laisserez-vous entrer?
Ainsi faut-il voir les pensées malsaines qui se présentent.

Il nous faut donc pratiquer la vigilance, la pleine conscience, et choisir avec soin ce que nous cultivons.

À bientôt


Mise en oeuvre

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Jusqu’au sutra II.28, nous étions dans l’aspect théorique du yoga, à partir d’ici on passe à l’aspect pratique.

B.K.S. Iyengar parle de « mise en œuvre » lorsqu’il aborde l’astanga yoga (les huit membres du yoga). L’astanga yoga, dit-il, agit comme une ligne de base et comme un tremplin pour favoriser l’évolution et la stabilité du corps, du mental et du soi.
Le premier membre dont on parle est yama (code moral).

II.30 ahimsa satya asteya brahmacarya aparigrahah yamah
Ahimsa : respect de la vie, non-violence
Satya : franchise, authenticité
Asteya : Ne pas voler, ne pas envier
Brahmacyara : chasteté, modération, continence
Aparigraha : refus de possessions inutiles, absence d’avidité
Yamah : disciplines, restrictions

Les yama sont la non-violence, la vérité, l’honnêteté, la modération et l’absence d’avidité.

Patanjali précise au sutra suivant (II.31) que ces règles sont universelles, elles ne sont pas limitées par le lieu, le moment ou les circonstances.
Ces règles peuvent (et doivent) également être un outil d’observation précieux lors de la pratique d’asana et de pranayama.
Au sutra suivant II.32, on aborde le deuxième membre du yoga : niyama (observances éthiques individuelles). Plus loin, Patanjali reviendra sur chacun des yama et niyama.

II.32 Sauca santosa tapah svadhyaya Isvarapranidhanani nyamah
Sauca : propreté, pureté
Santosa : contentement
Tapah : ascèse, désir ardent, zèle, pratique intense
Svadhyaya: étude de soi, études qui mènent à la connaissance de soi
Isvarapranidhanani : abandon au divin

Les niyama sont la propreté, le contentement, une pratique ardente, l’étude de soi et l’abandon au divin.

Voici comment Françoise Mazet traduit ce sutra :
« Être clair dans ces pensées et ses actes, être en paix avec ce que l’on vit, sans désirer plus ou autre chose, pratiquer avec ardeur, apprendre à se connaître et à agir dans le mouvement de la vie, telles sont les règles de vie que propose le yoga ».

À bientôt


combattre l’ignorance

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Patanjali a beaucoup insisté jusqu’ici sur les causes de souffrance, particulièrement l’ignorance, mère de toutes les souffrances. Il nous a confirmé aux sutra II.26 et II.27 que la solution pour vaincre l’ignorance est vivekakhyati – le discernement, la sagesse discriminative- qui nous permet de distinguer l’accessoire de l’essentiel, le transitoire du permanent.
Aux sutras suivants, il nous donne les moyens nous permettant d’acquérir et de développer cette sagesse discriminative.
II.28 Yoganganusthanat asuddhiksaye jnanadiptih avivekakhyateh

Yoganga : les composantes, les aspects, les membres du yoga
Anusthanat : pratique assidue
Asuddhih : impuretés
Ksaye : réduire, détruire
Jnana : connaissance, sagesse
Diptih : lumière, éclat, splendeur
A : vers, jusqu’à
Vivekakhyateh : essence de la connaissance, discernement, sagesse discriminative.

La pratique assidue des divers aspects du yoga détruit les impuretés, alors la connaissance éclairée devient sagesse discriminative.

« Le yoga, dit B.K.S. Iyengar, peut guérir ou réduire nos souffrances physiques, mentales, morales et spirituelles. La perfection et le succès ne seront obtenus que si l’on pratique avec amour et un entier dévouement ».

II.29 Yama niyama, asana, pranayama, pratyahara, dharana, dhyana, samadhayah astau angani

Yama : contrôle de soi, discipline, règles de vie dans la relation aux autres
Niyama : restrictions, observances, règles de vie dans la relation à soi-même
Asana : assise, posture
Pranayama : régulation, contrôle du souffle
Pratyahara : retrait des sens
Dharana : concentration
Dhyana : méditation
Samadhayah : absorption, conscience supérieure, état d’unité.
Astau : huit
Angani : composantes, membres

Un code moral (yama), une règle de vie déterminée (niyama), la potsure (asana), le contrôle du souffle (pranayama), l’intériorisation des sens vers leur source (pratyahara), la concentration (dharana), la méditation (dhyana) et la contemplation du Soi (samadhi) sont les huit membres du yoga.

Voila qu’on reconnait des mots plus familiers : asana, pranayama…et qu’on les situe dans un contexte plus vaste.

Comme elles sont nombreuses les raisons de pratiquer!

À bientôt


Vision claire

27

Ce qui, selon Patanjali, nous empêche de distinguer le transitoire de l’essentiel, c’est l’ignorance. L’ignorance est la cause de la souffrance. Voici ce qui détruit l’ignorance :
II.26 vivekakhyatih aviplava hanopayah
Vivekakhyatih : discernement, jugement, clarté, connaissance discriminative, vraie connaissance
Aviplava : sans confusion, tranquille, ininterrompu
Hanopayah : moyen pour faire disparaître, pour disperser

Le flot ininterrompu de la sagesse discriminative en pensées, en paroles et en actes détruit l’ignorance cause de la souffrance.

Vivekakhyatih, c’est une vision claire continue, permettant de comprendre ce que nous sommes et ce que nous ne sommes pas.
C’est d’être présent, conscient, de façon à distinguer entre les pensées et les croyances qui nous limitent et les intuitions qui nous viennent de notre essence.
On y développe l’autonomie, la maîtrise, la perspicacité, la capacité de ne pas se laisser contrôler par ce qui nous entoure et à rester constamment conscients de notre vraie nature.

II.27 Tasya saptadha prantabhumih prajna

Tasya : de ceci
Saptadha : en sept parties, de sept manières
Prantabhumih : frontière, extrémité du territoire
Prajna : connaissance profonde, sagesse.

La pratique ininterrompue du discernement mène à la connaissance profonde qui comprend sept sphères.

Patanjali ne donne pas de détails sur ces sept sphères ou territoires. Voici ce qu’en dit B.K.S. Iyengar :
Les sept états de la sagesse sont décrits différemment selon les commentateurs. Selon une version, ce sont : ce qui doit être connu est connu, ce qui doit être écarté est écarté, ce qui doit être atteint est atteint, ce qui doit être fait est fait, ce qui doit être réalisé est réalisé, aucune qualité (guna) n’obscurcit l’intelligence, le connaisseur atteint l’illumination et maintient sa lumière intérieure tout en accomplissant ses devoirs dans ce monde.
Il ajoute plus loin : En d’autres termes, par la pratique du yoga, le sadhaka maîtrise son corps, contrôle son énergie, restreint les fluctuations du mental et développe son sens du discernement, grâce auquel il agit correctement et devient lumineux.

À bientôt.